La Science des Anciens

Thème 6 :

Les Orientations Astronomiques

Les Orientations Astronomiques

“ Considérer l’orientation d’un monument dès le début de sa conception était chose évidente pour les architectes de l’Antiquité. (...) l’orientation donne un sens, il était inconcevable de construire quelque chose qui n’ait pas de sens.

Nous abordons là, en filigrane, la question fondamentale du sens de la vie et du principe selon lequel chacun de nos gestes puisse être en relation avec ce sens. Il est essentiel de bien intégrer cette idée, souvent oubliée mais pourtant simple, si nous souhaitons avoir une chance de comprendre les vestiges de notre lointain passé. ”

Extrait du livre “Mégalithes, Principes de la Première Architecture Monumentale du Monde”, Howard Crowhurst, 3ème édition, 2007, Epistemea.

Alors comment s’orienter ?

Il nous faut tout d’abord trouver l’axe autour duquel tout pourra ensuite se construire. 

Pour l’astro-géométrie, nous choisirons l’axe de rotation de la Terre sur elle-même, la seule référence cosmique qui nous appartient. Cet axe passe par les deux pôles de la Terre, le pôle Nord et le pôle Sud.

Ne pas perdre le Nord

Le Nord appartient au monde des étoiles. Il est matérialisé par l’étoile polaire, Polaris, point immobile, central, prolongement de l’axe terrestre. Le Nord est considéré par les anciens comme un lieu d’immortalité où la naissance et la mort n’ont plus lieu d’être. C’est pour cette raison que les étoiles qui ne se couchent jamais du fait de leur proximité au pôle furent appelées les “ impérissables ”.

En ayant repéré l’étoile polaire, l’ensemble des étoiles devient une carte qui permet de se repérer n’importe où sur Terre. Les étoiles sont les fidèles compagnons des navigateurs et des nomades. Leur position dans le ciel ne dépend que de la latitude et de l’heure. Dans une vie humaine, une étoile reviendra à la même position dans le ciel toutes les 24 heures, le temps d’une rotation terrestre.

 

La lumière du Sud

C’est là que se situe le feu de l’action, le ciel du Sud représente le domaine de la manifestation. Pour un observateur sédentaire, tout au long de l’année, la course du soleil oscille entre un extrême haut (solstice d’été) et un extrême bas (solstice d’hiver), créant ainsi un ruban, appelé bande zodiacale, formant une sorte d’arc encadrant le ciel du Sud et dans lequel vont se déplacer les astres dits “errants”, c’est à dire la lune, le soleil et les planètes, le destin des individus étant associé à la position des errants au moment de la naissance.

Voir à l’horizon

Si un monument est étroitement lié à un lieu donné, alors d’autres repères que les étoiles apparaissent. Dans un observatoire fixe, des repères fixes peuvent être trouvés à l’horizon. L’horizon représente le point de rencontre entre la Terre et le Ciel. Le sommet d’une montagne par exemple est un point de repère qui dure dans le temps. Il est aussi possible de construire des marqueurs à l’horizon en relation avec le point d’observation.

Un bâton et une ombre

Le voyageur avec son bâton de marche s’arrête dans un lieu et plante son bâton à la verticale. Il observe l’ombre produite par son bâton au sol. L’ombre est l’expression négative du Soleil. Patiemment, il observe l’ombre de son bâton se déplacer et changer de taille. Grâce aux observations répétées, il connaît maintenant le mouvement du Soleil, dans la journée et dans l’année. 

https://martouf.ch/wp-content/uploads/2019/06/Gnomon-21juin-solstice-ombre-hauteur-du-soleil.gif

Le Soleil s’arrête

Tout au long de l’année, l’observateur peut contempler le lever du Soleil. C’est le moment où le Soleil se trouve à l’horizon, entre le Ciel et la Terre. Jour après jour, la position du Soleil au moment de son lever change. Tel un pendule, Il balance à l’horizon entre deux points ou stations nommés Solstices (littéralement “stations du soleil”). Chaque jour, la position de coucher est symétrique à celle du lever par rapport à l’axe Nord Sud.

L'équilibre

Le battement du Soleil à l'horizon fait son aller retour en 365 jours. Dans ce cycle, il passe deux fois par le point central de son mouvement. Ces deux moments se nomment équinoxes, la nuit égale au jour. A l'équinoxe, le centre du Soleil à l'horizon indique l'est au lever et l'ouest au coucher. L’horizon Est d’où jaillissent les astres, pays du soleil levant, symbolise la naissance. L’ouest, à l’opposé, signifie le départ de la vie.

Les 4 points cardinaux

Le Nord, repère des étoiles et le Sud, repère du midi, point culminant des astres, se trouvent perpendiculaires à l'est et l'ouest, les repères du milieu. Ces 4 points divisent l'horizon en 4 parties égales.

L’axe Est-Ouest est perpendiculaire à l’axe Nord-Sud et correspond au centre du déplacement à l’horizon des levers et couchers du soleil, de la lune et des planètes, autrement dit de la bande zodiacale.

De 4 points à 360 degrés

La science ancienne divise le cercle de l’horizon en degrés. À chaque instant, le Soleil se trouve précisément à un endroit dans le Ciel correspondant à son azimuth (plan horizontal) et son élévation (plan vertical). Il y a 360 degrés dans le cercle et chaque degré se divise à son tour pour plus de précision. La convention détermine les points 0° et 360° au Nord. L’Est se trouve à 90°, le Sud à 180° et l’Ouest à 270°.

L'axe des solstices

Les points extrêmes de la course du Soleil peuvent donc être exprimés par une mesure en degrés. À la latitude de Carnac à l’époque de construction des monuments mégalithiques, le Soleil au Solstice d’Hiver se levait à un angle de 126,87° et se couchait symétriquement à un angle de 233,13° (=360-126,87). Au Solstice d’été cet angle est symétrique par rapport à l’axe Est-Ouest. Le Soleil se levait donc à un angle de 53,13° (126,87-90 = 36,87, et 90-36,87°=53,13) et se couchait à un angle de 306,87° (360-53,13).

Ces quatre points forment à cette latitude un rectangle ou les diagonales marquent les solstices. Le quadrilatère de Crucuno ( schéma ci-contre) est un monument construit sur ce principe. Il est parfaitement orienté Nord-Sud, Est-Ouest et ses diagonales donnent l'axes des solstices.

Chaque latitude a un rectangle solsticial propre, avec des proportions de largeur et longueur différentes.

Les mois de l'année

Dans l’année solaire, le calendrier est divisé en 4 saisons de 3 mois. Chaque début de saison correspond à une position majeure du Soleil. Équinoxes de printemps et d’automne, Solstices d’hiver et d’été. La division en 3 des saisons donne le zodiaque. Chaque début de signe du zodiaque est donc marqué par une orientation à l’horizon.


Le tiers du temps vaut la moitié de l’angle

La division en 3 d’une saison fait apparaître une “coïncidence” cosmique : le signe avant et le signe après l’équinoxe, le Soleil va se déplacer de la moitié de l’angle des solstices. À Carnac par exemple, pendant ces signes, le Soleil se déplaçait de 18,44°, soit la moitié de 36,87°, l’angle des solstices (par rapport à l’axe Est-Ouest). Ces mois correspondent aux signes Poissons, Bélier, Vierge et Balance.

Image ci-contre : “Le 21 avril, 30 jours après l’équinoxe, le Soleil a déjà parcouru la moitié de son chemin vers le solstice d’été”. 

Illustration extraite de La Science des Anciens, Tome 1, Carnac, Le Menec, Howard Crowhurst, 2017, Epistemea.

Les extrêmes de la Lune

Une fois compris le mouvement du Soleil, le déplacement des autres astres découle logiquement. Seule la durée du cycle change, mais le mouvement est similaire. À une exception près : la lune, astre complexe, suit un cycle long de 18,6 ans qui modifie les points extrêmes de son battement à l’horizon. Tout en gardant la même durée de cycle (27,3 jours), l’amplitude de son battement à l’horizon varie presque du simple au double.


Dolmens orientés

C’est donc grâce à cette connaissance de l’orientation d’un lieu en fonction des mouvements célestes que les monuments mégalithiques ont été érigés.

Dans la région de Carnac, l’orientation de plusieurs centaines de dolmens a été étudiée, notamment par Félix Gaillard. La quasi-totalité de ces dolmens s’orientent en fonction des points majeurs d’un calendrier luni-solaire. Pour le Soleil, l’orientation majeure est le lever du Soleil au Solstice d’Hiver soit un azimuth de 126,87°. 

Les images ci-contre présentent le résultat des relevés de Félix Gaillard, concernant les orientations de 156 dolmens dans le Morbihan. Plus le trait rouge est épais, plus le nombre de dolmens orientés dans cette direction est important. Son travail lui a permis d'arriver à la conclusion que l'ouverture des dolmens se fait principalement de l'est au sud, et marque dans de nombreux cas des moments de l'année comme le solstice ou l'équinoxe.



Vient ensuite l’orientation vers le début du signe des Poissons (ou la fin du signe de la Balance), soit un azimuth de 108,44°. Pour la Lune, beaucoup de couloirs de dolmens s’orientent sur le lever extrême Sud de la Lune, qui se levait, à Carnac, à un angle de 135°.



Le solstice d'hiver à Gavrinis

Le cairn de Gavrinis est orienté sur le lever du Soleil au solstice d’hiver. Les rayons du Soleil comment à entrer dans le couloir les jours précédents, et jour après jour, éclairent les gravures le long du couloir jusqu’au solstice où les rayons arrivent jusqu’au fond de la chambre.

Les alignements

À Carnac, les alignements viennent confirmer la présence de ces deux angles majeurs du calendrier solaire. La première partie des alignements vise le lever du Soleil au début du signe du Taureau (ou la fin du signe de la Vierge), la deuxième partie vise le lever du Soleil au Solstice d’été, et la troisième partie vise le lever du Soleil aux équinoxes.

L’astro-géométrie de Carnac

Ces angles donnés par le mouvement cosmique peuvent aussi se retrouver dans la géométrie. En effet, l’angle de 36,87° qui marquait les solstices à Carnac correspond au petit angle d’un triangle de 3 unités sur la hauteur et 4 unités sur la base, donnant logiquement 5 unités sur la diagonale. La moitié de cet angle, délivrée lui aussi par le mouvement cosmique, est un angle de 18,44° et correspond aussi à un rapport exact de 1 sur la hauteur et 3 sur la base. Il y a donc ici la manifestation d’une harmonie entre mouvements célestes et géométrie sacrée.

Image ci-contre : “Le calendrier des levers du Soleil au printemps dans un bicarré de 3 par 6”.  Illustration extraite de La Science des Anciens, Tome 1, Carnac, Le Menec, Howard Crowhurst, 2017, Epistemea.


Tout est relatif

En continuant son voyage, l’observateur nomade qui a reçu l’enseignement des monuments de Carnac répète l’expérience dans un autre lieu et comprend que les mouvements du Soleil dépendent de la latitude à laquelle il se trouve. En se dirigeant vers le Sud, il arrive devant les pyramides de Gizeh. Ici, l’angle du Solstice par rapport à l’axe Est-ouest n’est pas 36,87° mais 28,07°. Les points extrêmes du mouvement ne sont plus les mêmes, alors l’architecture du lieu se conforme à l’harmonie relative à la latitude. Partout sur Terre, le voyageur attentif trouvera les traces de cette ancienne façon de penser.

Conférence remasterisée :

Les orientations astronomiques dans les dolmens et les menhirs

Au travers de nombreux exemples, Howard Crowhurst nous montre avec quel degré de précision les bâtisseurs du Néolithique ont érigé les dolmens et menhirs en fonction du Soleil et de la Lune et des mêmes principes, en Europe et dans le monde entier.

Les vidéos du thème :

Les orientations astronomiques

Voir toutes les vidéos